Catégorie : Contes, Légendes, Souvenirs et Tourisme.
CARNET D’UN TOURISTE.
NOTRE DAME DEL CASTELL ULTRERA
Ermitage de Notre Dame du Château : "La porte des processions"
« L’excursion à Notre Dame du Château (Nostre Senyora
del Castell) est une des courses les plus agréables et les moins fatigantes,
que l’on puisse faire dans la région des Albères. Le sentier s'élève
insensiblement, en zigzaguant sur les flancs d’un coteau couvert de vignes
d’abord, de bruyères et de genêts ensuite. A mesure que l’on s’élève, la plaine du Roussillon se
découvre de plus en plus ; l’horizn s’élargit ; les pics se montrent
de plus en plus nombreux au nord et à l’ouest, tandis qu’à l’est la Méditerranée
étend sa grande nappe bleue, que pas un pli ne ride. Cliquer sur la photo pour l'agrandir
« Voici l’ermitage de Notre Dame du Château précédé d’une grande esplanade complantée d’arbres, où s’ébattent les pèlerins les jours d’aplech – de grande fête- le lundi de Pentecôte notamment. Contre un mur, une fontaine momentanément bouchée avec un rondin en bois.
« Les locaux de l’ermitage sont très vastes. A l’entrée, s’aperçoit l’église. Sur la façade nord, un portail de l’ancienne chapelle. Tous les ornements ont été encastrés dans la façade, mais avec fantaisie !... Les chapiteaux sont placés au dessus de l’archivolte ; les colonnes ne soutiennent rien ; les anciens ornements ont été conservés, c’est déjà quelque chose ; et on peut momentanément en les voyant reconstituer l’ancien portail.
« Sous une voûte, un grand réservoir et trois robinets débitant une eau très fraîche. On monte par quelques marches sur une vaste terrasse, gazonnée et ombragée, dominant la première esplanade ; c’est ici que les habitants de l’ermitage viennent se promener en été et prennent leur repas. C’est un coin délicieux, d’où l’on découvre un splendide panorama.
Pénétrons dans l’ermitage, dont l’ermite « Paou » fait les honneurs avec une bonne grâce rare ; une vaste cuisine, une grande salle à manger, un mobilier primitif mais confortable ; à côté, quelques tables . D’autres corps de logis sont encore affectés au logement des pèlerins, qui viennent assez nombreux en été séjourner à l’ermitage.
« On entre dans la chapelle par une porte percée dans la façade ouest donnant sur la terrasse. La chapelle est vaste mais sans rien d’original ; de ci de là quelques ex-voto. Le maître autel est consacré à la vierge, placée dans un fort joli camaril ; à gauche, Sainte Marie Madeleine couchée dans une grotte, une tête de mort à la main.
Cet ermitage tire son nom de l’ancien château d’Ultréra bâti
à une courte distance au sud est sur un rocher à pic. Ce rocher est inaccessible
de tous les côtés ; oui, d’après les apparences ; en réalité, il
existe un passage (coté sud) par où l’on atteind aisément l’antique
forteresse ; à droite, à gauche, à l’est, à l’ouest, se dressent des à
pics formidables. Ce n’est que par une étroite cheminée, pratiquée
à l’ouest en s’aidant des pieds et des mains , en faisant force contorsions, en
se couchant à plat ventre , en se mettant à genoux, en s’arc-boutant, bref en
faisant mille acrobaties que l’on peut arriver à atteindre un pan de mur en
ruine et à s’y accrocher. Si on desserre la main trop vite, si on glisse, si on
est pris de vertige, on roule au bas du
précipice au risque de se rompre les os. Aussi, avons-nous poussé un grand
soupir de satisfaction en atteignant le faite !....On se demande comment
pouvaient faire les défenseurs du château pour entrer et sortir de ce nid
d’aigles.
« Du vieux château militaire d’Ultréra, il ne reste plus que quelques pans de murs épais, quelques arceaux, des vestiges de courtines, d’échauguettes et de souterrains. Tout le reste s’est écroulé, a disparu, emporté par les ans et par les tempêtes. Quelque chose est resté, que n’ont pu emporter ou effacer ni les siècles ni les intempéries : le panorama grandiose qui se déroule de ce belvédère.
« Au nord c’est la vaste, la magnifique plaine du Roussillon, toute parsemée de villes et de villages. Argelès, Saint André, Saint Génis, Palau, Sorède, Laroque, Villelongue dels Monts, Montesquieu, Banyuls dels Aspres, Villeneuve de la Raho, Elne, Saint Cyprien, Canet, Sainte Marie, Perpignan, etc.…etc.…Les Corbières, ferment l’horizon, tandis que sur la plaine ocreuse ; que le printemps n’a pas encore verdie les routes déroulent dans tous les sens leurs longs méandres blancs. A l’est, c’est la mer toute bleue, toujours belle, sans un frémissement : l’étang de Saint Nazaire et plus loin, l’étang de Salses forment des nappes au teint plombé. Le long de la ligne du rivage, sans échancrure nettement marquée, c’est l’embouchure du Tech.
Au sud, c’est d’abord la tour de la Massane le rocher de las Médas et le Néoulous formant un vaste cirque, auquel les forets de chênes lièges donnent une couleur sombre et un aspect sévère. Tout en bas, les croupes noires des monts viennent par un bizarre contraste mourir dans un vallon verdoyant et gai, aux gras pâturages. Quelques fermes aux toitures rouges et aux façades blanches se dressent dans un riant paysage ; c’est le vallon de Lavall.
« A l’ouest c’est le San Cristau, le Costa Bona, le Canigou toujours beau, toujours magnifique sous son manteau de neige, le Carlit et le Puig Péric tout blancs, Madre et le pic Dourmidou.
Enfin, en bas, Notre Dame du Château, plus bas encore les métairies avoisinant Sorède se dissimulant derrière un bouquet d’arbres.
C’est beau, il n’y a pas à dire ; et accoudés sur les pans de murs croulant, on regarde, on regarde, hypnotisés par ce magnifique spectacle.
C’est à regret que l’on quitte Notre Dame du Château, emportant de ce site, trop peu connu et pourtant si agréable, un excellent souvenir. »
E. BROUSSE Fils
Histoire recueillie dans le bulletin "Notice Historique par l'Abbé J.Coll Edition1898 qui se vendait au profit de l'ermitage (archives J.Margail)
Commentaires
Une belle histoire qui donnera envie de découvrir ce merveilleux site à ceux qui ne sont encore jamais monter à NDC.